Et pourquoi pas ?
Payer les paysans pour protéger les forêts est une solution, selon la BM
WASHINGTON (AFP) - Inciter les industriels à rémunérer les paysans pour
qu'ils protègent leurs forêts, véritables poumons de la planète, au
lieu de les détruire, peut être une solution pour lutter contre la
déforestation, estime la Banque Mondiale.
Par David DIEUDONNE
Ce système, là où il est appliqué, impose aux sites industriels, grands
consommateurs d'énergie, de respecter des quotas de CO2, et permet aux
entreprises les plus polluantes de racheter à ceux qui le sont le moins
leurs quotas non utilisés. Ces droits sont cotés sur un marché, comme
des instruments financiers.Ce raisonnement permettrait d'étendre aux forêts et à leurs exploitants
le système de droits d'émission, ou marché du carbone, tel qu'il a été
inventé pour les industries polluantes.
Ainsi les entreprises polluantes échangeraient, avec les propriétaires
forestiers, des obligations de conservation contre des droits de
polluer.
"L'ensemble du mécanisme n'est pas très très simple", reconnaît M.
Bourguignon. "Mais il n'y a pas de raison de ne pas rechercher des
solutions de ce type là".
Car, d'un point de vue économique, la situation actuelle est profondément illogique.
En Amérique Latine
par exemple, la forêt tropicale dense est souvent défrichée pour en
faire des terrains de pâturages dont la valeur dépasse à peine 300
dollars à l'hectare.
Or, la valeur de ces forêts pourrait être cinq fois supérieure si elles
étaient préservées et servaient à stocker le CO2, estime la Banque.
De plus, en brûlant l'hectare de forêt qui servira à ses futures
récoltes, l'agriculteur libère jusqu'à 500 tonnes de CO2, dont chacune
est cotée autour de 15 dollars sur le marché européen du carbone.
Pour obtenir un hectare cultivable d'une valeur de 300 dollars, le
paysan a donc brûlé près de 7.500 dollars de subventions potentielles.
Plusieurs obstacles s'opposent toutefois à la mise en oeuvre d'un tel système.
D'abord, c'est un mécanisme négatif: "Cela signifie que vous payez les
gens à rester devant leurs arbres et à ne pas les abattre", résume M.
Bourguignon. Il faut donc s'assurer que l'argent est réinvesti dans des
zones agricoles déjà défrichées et servir à des récoltes plus
productives.
Ensuite, qui faut-il financer? "Certains ont été découragés parce
qu'ils avaient imaginé des systèmes dans lesquels le paiement allait de
chaque gros fournisseur d'énergie à chaque fermier", explique Kenneth
Chomitz, l'auteur du rapport de la Banque mondiale sur le sujet rendu public lundi.
Pour lui, "l'incitation financière doit être donnée au gouvernement".
Mais dans ce cas, un problème demeure: comment s'assurer que l'argent
reviendra bien aux paysans concernés? "C'est au pays de le gérer",
répond M. Bourguignon, même si "on peut imaginer des mécanismes
d'incitation".
Autre contrainte, "le marché des droits d'émission est un marché qui
pour l'instant est assez limité", souligne l'économiste en chef de la Banque mondiale, "parce que l'un des gros acteurs, les Etats-Unis, ne sont pas là et parce qu'aussi de gros acteurs potentiels comme les géants du développement la Chine et l'Inde n'y sont pas du tout".
La mise en place de mécanisme à si long terme demanderait aussi que les objectifs du protocole de Kyoto, qui lui sert de cadre, soient prolongés au-delà de 2012, leur échéance actuelle.
http://fr.news.yahoo.com/23102006/202/payer-les-paysans-pour-proteger-les-forets-est-une-solution.html