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J'ai mal à ma Terre
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6 juin 2007

Vue simpliste ou réaliste ?

Les cyclones vont-il se multiplier? Le débat fait rage chez les climatologues Par Frédéric GARLAN

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PARIS (AFP) - Le réchauffement climatique en cours rend-il inéluctable une augmentation de la fréquence des cyclones ? Le débat fait rage chez les scientifiques, qui commencent à peine à comprendre la genèse de ces phénomènes qui ravagent régulièrement les zones tropicales.

Entre 1971 et 1994, un ou deux cyclones majeurs étaient enregistrés chaque année sur l'Atlantique nord. De 1995 à 2005, on a dépassé les quatre. 2005 a battu tous les records, avec pas moins de 15 cyclones recensés, dont Katrina (1.500 morts aux Etats-Unis) et Stan (2.000 morts au Guatemala).

"Un cyclone est une machine thermique qui pompe la chaleur dans l'océan et la redistribue dans l'atmosphère. Pour autant, établir un lien direct entre réchauffement et augmentation du nombre des cyclones est une vue extrêmement simpliste", affirme Franck Roux (Laboratoire d'aérologie de Toulouse).

Les scientifiques qui défendent cette thèse s'appuient sur les données concernant l'Atlantique, mais cette région ne contribue que pour 15% au nombre total de cyclones. Dans le Pacifique, la région la plus affectée, la fréquence des cyclones est en revanche en diminution, note M. Roux.

Les scientifiques expliquent que le réchauffement a aussi pour conséquence une renforcement des cisaillements verticaux de l'atmosphère. Parce qu'ils soufflent dans différentes directions à différentes altitudes, ces vents peuvent déchiqueter les jeunes tempêtes avant qu'elle ne prennent de l'ampleur.

Pour James Elsner (Florida State University), qui s'exprime dans le dernier numéro de la revue Nature, "le cisaillement vertical est plus important que la température des océans dans la modulation de l'activité des cyclones".

En étudiant la croissance des coraux, l'équipe menée par Johan Nyberg (Geological Survey of Sweden) a pu reconstituer l'activité cyclonique des 270 dernières années. Elle en a déduit que la période actuelle pourrait en fait marquer un retour à la normale, après le calme exceptionnel des années 60 à 90.

Une autre étude de paléoclimatologie, due à Jeffrey Donnelly (Woods Hole Oceanographic Institution), relève que l'activité cyclonique était intense il y a deux cents ans, pendant le "petit âge glaciaire". Or les eaux océaniques étaient alors plus froides de deux degrés qu'elles ne le sont aujourd'hui.

Pour M. Donnelly, la corrélation est en revanche "frappante" entre les phases d'activité cyclonique soutenue et la survenue d'El Nino, un réchauffement cyclique des eaux du Pacifique central et oriental, qui perturbe les échanges de chaleur et d'humidité entre l'océan et l'atmosphère.

En intensifiant les cisaillements de vent, El Nino tue les cyclones dans l'oeuf. Un lien manifeste existe aussi entre l'intensité de la mousson qui arrose l'Afrique sahélienne et la genèse des cyclones de l'Atlantique. Or ces deux phénomènes restent encore aujourd'hui très mal compris.

Les cyclones jouent enfin un rôle important, mais jusqu'ici sous-estimé, dans la redistribution de la chaleur de l'atmosphère vers les froides profondeurs des océans. Ils pourraient ainsi recycler 15% de l'énergie de l'atmosphère, avancent Matthew Huber et Ryan Sriver (Université Purdue).

Les vents du cyclone, puissants et circulaires, fonctionnent en effet comme les lames d'un mixer, entraînant les eaux de surface vers le fond de l'océan. "Le brassage des eaux provoqué par les cyclones pourrait donc avoir pour effet de stabiliser les températures tropicales", affirment les deux scientifiques.

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